Famille tu me hais de Gaël Morel
Gaël Morel revient. Non pas avec un film de fiction cette fois-ci mais avec un documentaire aussi bref que percutant, sorti par Epicentre Films Editions, en DVD et VOD depuis le 18 mai.
Le site Internet de l'éditeur, son Facebook et son Twitter.
Ce documentaire commence par des images d'archives où 10 ans auparavant, Gaël Morel parlait de l'association Le Refuge (dont il est aujourd'hui le parrain), une association LGBTQ+ qui aide des jeunes hommes et femmes, abandonnés le plus souvent par leurs familles à cause de leurs orientations sexuelles.
En 2020, pour lui, rien n'a véritablement changé, le constat est clair et alarmant. Malgré l'avancée manifeste des droits pour la communauté homosexuelle en 2013 avec la loi promulguant le mariage pour tous, force est de constater que, parallèlement, les actes homophobes et transphobes ont augmenté chaque année significativement.
Pire encore, c'est bien dans la famille elle-même, dans la sphère privée, celle qui est censée protéger et aimer que la violence, cachée de tous cette fois-ci a lieu. La famille, espace sécurisant et épanouissant, devient un lieu où les violences physiques, psychologiques et morales sont tout aussi fortes que celles de la rue, laissant des traces indélébiles chez tous, à commencer chez les victimes.
Dans ce documentaire, Gaël Morel se propose d'interviewer des jeunes des années 2020, mineurs pour plusieurs d'entre eux, qui ont été chassés de leur famille ou qui ont décidé de partir pour (sur)vivre. Leurs parents, frères et sœurs les ont tout simplement rejetés. Accueillis et accompagnés par Le Refuge, ils témoignent à visage découvert. Des premiers jours de leur fuite ou de leur éviction jusqu'à aujourd'hui. Plusieurs portraits sincères et des histoires singulières.
On y découvre des personnes variées de part leur milieu social, culturel ou religieux. Hommes, femmes, trans. Ils sont honnêtes, courageux et livrent tout de leurs expériences, sans honte de la caméra. Il est bouleversant de les découvrir face à l'homophobie brutale et violente de leurs familles. On comprend qu'ils ont connu la rue, les galères, la prostitution, l'errance. Que la mort s'est parfois rapprochée si près. Ils ont survécu et nous racontent ce qu'ils en retiennent. Ce qu'ils attendent aussi parfois. Et leur capacité ou non à pardonner.
La durée du documentaire est de 52 minutes. Un peu frustrante car on aurait tellement continué à suivre ces chemins de vies brisées. Elles se reconstruisent parfois avec un détail, une personne. Ce jeune homme par exemple, qui remercie sa professeure principale, de l'avoir soutenu pour obtenir son CAP est bouleversant. D'autant plus lorsqu'il parle de ses contrats de travail, brefs peut-être mais dont il est fier et pour lesquels il aurait aimé que sa mère s'enorgueillisse également. Qu'elle soit fière de son fils, même s'il est PD, parce qu'il a appris à se battre, seul contre tous. La séquence est rendue plus acceptable par le choix magistral du jazz du clarinettiste Louis Sclavis qui prolonge ces instants et les sublime.
Ce documentaire est accompagné de suppléments véritablement instructifs. Catherine Schwartz, la monteuse, donne un regard précieux sur les choix qu'elle et Gaël Morel ont dû faire face au volume des rushes. Du travail de montage auquel la musique, entre autres a permis de donner du relief et un lien entre les différents portraits. En bonus, une scène coupée nous offre un ultime portrait, bouleversant lui aussi dans ce qu'il donne à voir de la capacité d'un jeune homme à se reconstruire par son talent artistique.
Vous l'aurez compris, nous sommes plus que conquis et touché par ce documentaire, précieux par ces témoignages et la qualité de la réalisation. Commencez par découvrir la bande annonce, puis foncez voir ce documentaire rare, troublant et plein d'espoir malgré la haine de ces familles qui n'ont jamais compris qu'avoir des enfants c'est avant tout leur permettre d'exprimer leurs individualités.
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