La loterie et autres contes noirs de Shirley Jackson

 

Après la lecture de Hangsaman, une envie de relire les nouvelles de Shirley Jackson. Beaucoup d'écrivains se réclament aujourd'hui de cette écrivain qui, en 1948, a marqué les esprits en publiant dans le New Yorker La loterie, nouvelle choquante et au ton nouveau. Jamais le journal n'avait reçu autant de courriers injurieux pour une nouvelle. 

Dans ce recueil de 13 nouvelles, Shirley Jackson charcute ses personnages dans des situations simples du quotidien. Tout y passe : méfiance, peur, anxiété, névroses. Elle explore les travers de la société américaine conservatrice de son époque, son conformisme étouffant. Dans La possibilité du mal, elle révèle la méchanceté et la mesquinerie des gens. La bonne épouse est délicieusement odieuse.

Mais ce qui me frappe vraiment chez cette écrivaine, c'est son talent à insinuer un réel malaise persistant chez son lecteur. Les non-dits et les sous entendus sont dérangeants. Après La loterie, c'est la nouvelle Louisa je t'en prie, reviens à la maison, qui m'a le plus perturbée. J'ai été obligé de relire la fin plusieurs fois en me disant, décidément elle faisait très fort. C'est bluffant et jouissif. Et d'un autre côté, je suis resté parfois perplexe ne sachant pas expliquer ce que je ressentais exactement, à l'image de Hangsaman. Comme si je savais que la digestion ne se ferait pas en une seule fois. D'où la nécessité ou du moins le grand plaisir de relecture.

La longue postface est des plus éclairante sur le travail et la vie privée de l'écrivain. 

Je vous recommande aussi le numéro 99 de l'excellente revue Bifrost qui lui est consacrée ainsi que l'adaptation en bande dessinée de La loterie par Miles Hyman, petit fils de la romancière.

La loterie et autres contes noirs - Shirley Jackson - Rivages/Noir - 2019