Il tempo materiale (Le temps matériel) di Giorgio Vasta (suite)
Dans un précédent post, j'annonçais que ce roman allait être un de mes livres les plus marquants de 2010. Je confirme, car pour un 1er roman, Giorgio Vasta m'a convaincu. Il est parfois difficile de parler d'un livre qui vous bouscule, vous rend aux tripes...En dehors de l'histoire, c'est la poésie, l'ambiance, la tension tout au long du roman qui m'ont énormément plu.
Commençons par l'histoire sans en dire trop.
Nous sommes en 1978 à Palerme. Une bande de 3 gamins de 11 ans sont fascinés par les Brigades Rouges qui cette année vont faire parler d'eux, notamment par l'enlèvement d'Aldo Moro. Les enfants découvrent à la télé et dans la presse les différents rebondissements de cette affaire qui tiendra en haleine les italiens.
A vrai dire, ils ne comprennent pas tout...mais qu'importe. Néanmoins, très futés pour leur âge, commence à germer en eux l'idée de rébellion, d'opposition contre "un autre", et l'envie de se démarquer, de se faire entendre. Quoi de plus normal pour de jeunes adolescents me direz-vous ? Sauf que ça commence à dérailler lorsque leur vienne l'idée de copier le groupe terroriste d'extrême gauche.
Ils commencent par se trouver des surnoms en s'appelant "camarades" et inventent un alphabet muet : "l'alphamuet" : un langage commun, afin de communiquer sans que d'autres personnes puissent comprendre.
Puis viennent leurs premières expériences. Prenant très au sérieux leur activité de "terroriste", ils établissent des filatures, prenant de nombreuses notes, agissant de manière méthodique. Après de petits délits dans leur collège , rien de plus normal d'imiter réellement les Brigades Rouges et d'envisager un enlèvement...
Girogio Vasta transpose la lutte politique des Brigades Rouges et la violence de leurs actions à hauteur d'enfant. Il n'est pas question pour ces jeunes protagonistes de se lancer dans un lutte sans y trouver un fondement idéologique, reprenant à leur compte les arguments des adultes. Faire exploser des bombes, enlever des personnes, les torturer trouvent une justification morale et nécessaire. Leur militantisme et leurs actions sont un véritable pouvoir créateur. Cela donne un roman d'autant plus cruel que ce sont évidemment des enfants.
C'est là que le talent littéraire opère : réussir à montrer de manière extrêmement intelligente les mécanismes et le processus par lequel ces enfants vont entrer. De manière paradoxale, la conscience de leur engagement et leur aveuglement déconcertant les emmènent dans un engrenage d'une rare violence. Des dégâts irréparables dans la tête d'enfants à l'âge de l'apprentissage de la vie.
Une histoire violente sans concession, une beauté littéraire. Je ne peux que vous conseillé ce roman qui est "en cours de traduction dans plusieurs langues et chez de prestigieux éditeurs".
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